Pierre Sgamma — Le Cavalier casqué

Cette sculpture en céramique, œuvre signée de Pierre Sgamma, renverse avec poésie et ironie la figure du cavalier. L’homme, debout, solidement campé sur ses deux jambes et nu sous son casque, porte autour de sa taille sa monture — un animal imaginaire, mi-cheval mi-jouet, enluminé d’un motif foisonnant.

Ici, c’est l’homme qui porte le cheval, inversant le rapport de force traditionnel et interrogeant la relation de domination entre l’humain et l’animal, entre le corps et l’esprit, entre le réel et le symbole.

La terre cuite, brute et chaleureuse, se marie à des pigments et des oxydes sombres et mats. Le modelé, à la fois naïf et expressif, confère à la figure une humanité désarmante : on y lit autant d’humour que de gravité. Le casque, rappelant celui d’un pilote moderne, cache le visage et fait de cet homme un archétype universel, un témoin du courage et de la vulnérabilité mêlés.

Ancien cavalier équestre, Pierre Sgamma transpose dans son œuvre la mémoire du corps à cheval : la tension, l’équilibre, la confiance entre deux êtres. Ses sculptures, souvent centrées sur la figure humaine, traduisent cette recherche d’un dialogue entre puissance et fragilité. Depuis les années 1990, il explore la céramique comme une matière vivante, capable d’exprimer l’intériorité et la métamorphose. Son univers, peuplé de personnages hybrides, rêveurs ou en lutte, évoque autant la mythologie que le théâtre intime de l’homme contemporain.

Avec ce Cavalier, l’artiste semble célébrer l’enfance du monde : celle où le jeu, la peur et la tendresse coexistent encore. L’homme, lourd de son animal, avance sans arme ni monture véritable, mais avec la conscience lucide de porter sa propre légende.